Accueil > Lectures et études > Articles
Articles
Cette rubrique reprend des articles déjà publiés dans des revues papier (ou en ligne) ou dans des volumes collectifs il y a plus de deux ans. Ils ne sont reproduits qu’avec les permissions appropriées.
Beaucoup d’autres articles en ligne sont signalés par des liens directement dans la Bibliographie critique.
Les propositions d’articles inédits peuvent être envoyées au comité scientifique des Cahiers Claude Simon.
[1] Claude Simon, Histoire, Minuit, Paris, 1967. Dans cet article, les numéros de pages donnés entre parenthèses à la suite des citations renvoient à cette édition.
[2] Entretien de Claude Simon, « Le Passé recomposé », propos recueillis par Aliette Armel, in Magazine littéraire, n° 275, mars 1990, pp. 96-103.
[3] Nous pourrions montrer également comment la narration met à mal le discours religieux, ou encore le discours économique. Mais dans ces deux cas, nous ne parlerons pas de deuil, dans la mesure où le personnage n’a jamais adhéré à ces discours. Il ne perd rien, donc, en se plaçant à distance d’eux.
[4] La place de l’image et du regard est centrale dans l’œuvre de Claude Simon, doué d’une mémoire visuelle hors du commun. Avant d’écrire, ce dernier a d’abord voulu être peintre. Il a fréquenté l’académie d’André Lhote en 1933. Simon a également été photographe et a publié Album d’un amateur, Remagen-Rolandseck, Rommerskirchen, 1988 et Photographies 1937-1970, préface de Denis Roche, texte de Claude Simon, Maeght, coll. « Photo-cinéma », Paris, 1992. La présence de la photographie est double dans son œuvre littéraire. D’une part, de nombreuses photographies, réelles ou fictives, sont décrites ; le personnage principal du Vent (1959) est photographe. La mère du narrateur, dans Histoire et dans L’Acacia (1989), passe son temps à photographier le monde qui l’entoure. Ces photographies jouent souvent le rôle, pour le narrateur-auteur, d’archives familiales. D’autre part, le médium photographique est très souvent donné comme métaphore du processus de perception et du souvenir : les images mentales, les souvenirs prennent souvent la forme de clichés photographiques, trahissant en cela une vision discontinue et fragmentaire du réel. Sur la photographie chez Claude Simon, lire : Irene Albers, Claude Simon – Moments photographiques, Presses universitaires du Septentrion, coll. “Claude Simon”, Villeneuve d’Ascq, 2007. De manière plus générale, cette fascination pour l’image visuelle (tableau, photographie, cartes postales) se traduit dans les romans par une prédominance de la description. Elle est première au sens où elle est le moteur de la fiction.
[5] Georges Didi-Huberman, Ce que nous voyons ce qui nous regarde, Minuit, coll. “Critique”, Paris, 1992, p. 14.
[6] Roland Barthes, La Chambre claire, Note sur la photographie, in Œuvres complètes, T. III, 1974-1980, éd. Seuil, [1980], 1995, p. 1114.
[7] Walter Benjamin, “L’œuvre d’art à l’époque de sa reproductibilité technique (dernière version de 1939)”, in Œuvres complètes III, traduit de l’allemand par Maurice de Gandillac, Rainer Rochlitz et Pierre Rusch, Gallimard, coll. “Folio-essais”, 2000, p. 278.
[8] Dans son étude sur Baudelaire, Benjamin montre qu’avec l’avènement de la photographie, le vécu – Erlebnis –, forme de souvenir aliénée et réifiée, s’est substitué à l’expérience – Erfahrung. La photo ne peut que conserver le vécu et non le contenu de l’expérience. Voir : Walter Benjamin, “Sur quelques thèmes baudelairiens”, in Œuvres complètes III, op. cit., pp. 329-390.
[9] Roland Barthes, La Chambre claire, Note sur la photographie, in Œuvres complètes, T. III, 1974-1980, op. cit., p. 1126.
[10] À ce sujet, citons Claude Simon lui-même qui, dans un ouvrage mêlant son texte et ses propres photographies, écrit : « C’est aussi en partie autour de photos de ruines que s’est constitué cet album. Je ne crois pas que l’on doive voir là l’effet chez moi d’une quelconque morbidité. Après tout, les ruines sont des manifestations de la vie dans ce qu’elle a de plus robuste [...]. Nous sommes tous constitués de ruines : celles des civilisations passées, celles des événements de notre vie dont il ne subsiste dans notre mémoire que des fragments ». Album d’un amateur, op. cit., p. 18.
[11] Sigmund Freud, “Deuil et Mélancolie”, in Métapsychologie, trad. de l’allemand, revue et corrigée par Laplanche (J) et Pontalis (J.-B.), Gallimard, coll. “Folio-essais”, 1968.
[12] Voir : Michel Hanus, « Le travail de deuil », in Le Deuil – Revue française de psychanalyse, sous la direction de Nadine Amar, Catherine Couvreur et Michel Hanus, PUF, Paris, 1994, p. 14.
[13] Voir : Jean Allouch, Érotique du deuil au temps de la mort sèche, E.P.E.L, Paris, 1997, p. 33.
[14] Voir sur ce point : Marie-Frédérique Bacqué et Michel Hanus, Le Deuil, PUF, coll. “Que sais-je”, 2001, p. 37.
[15] Claude Simon, Album d’un amateur, op. cit., p. 18.
[16] Sigmund Freud, « Deuil et Mélancolie », art. cit., p. 150.
[17] Un emploi proche est à relever p. 212 : « couronne funèbre aux teintes mélancoliques ».
[18] Voir Stéphanie Orace, « Histoire de Claude Simon : le fragment comme espace du silence », in Séminaire GRES - L’écriture fragmentaire : théories et pratiques, http://www.mediom.qc.ca/extrudex/ar...
[19] Expression empruntée à Maurice Blanchot, L’Espace littéraire, Gallimard, coll. “Folio-essais”, Paris, 1955, p. 20.
[20] Claude Simon, cité par Gerhard Dörr,« Biographie oder Bildersprache ? Claude Simon über sein neuestes Werk Les Corps conducteurs », in Die neueren Sprachen, n° 5, mai 1972.
[21] Cette description de l’arbre devant lequel écrit le narrateur au début d’Histoire, on la retrouve à l’excipit et dans le titre même du roman de 1989, L’Acacia, récit qui poursuit l’enquête généalogique.
[22] Dante, La Divine Comédie – Le Paradis, traduction, introduction et notes de Jacqueline Risset, GF-Flammarion, coll. “Bilingue”, Paris, 1992, p. 14.
[23] Maurice Blanchot, L’Ecriture du désastre, nrf-Gallimard, Paris, 1980, p. 217.
[24] Un vers de Paul Celan condense cette idée : « Niemand zeugt für die Zeugen » – personne ne témoigne pour les témoins – ,« Aschenglorie », in Atemwende/Renverse du souffle, traduit et annoté par Jean-Pierre Lefebvre, Le Seuil, Paris, 2003.
[25] On déplorera ainsi l’attitude de certains traditionalistes qui persistent à mener un combat d’arrière-garde en excluant a priori, aujourd’hui encore, toute possibilité d’utiliser des outils linguistiques dûment calibrés pour analyser de manière précise et détaillée la texture verbale des récits simoniens.
[26] Apparenté, notons-le, à celui de « sur-structuration », avatar moderne de la définition jakobsonienne de la littérarité comme projection de l’axe paradigmatique sur l’axe syntagmatique (cf. Jakobson 1963 : 220, 232, Aroui 1996 : 9-12, Yocaris 2014).
[27] Nous reprenons ici la terminologie des rhétoriciens du Groupe μ (1990 : 65).
[28] Pour plus de précisions sur ce point, v. Yocaris & Zemmour 2010.
[29] Pour plus de précisions sur le concept de « schématisation discursive », v. Grize 1982 : 172, Grize 1996 : 50.
[30] Pour plus de précisions sur le concept de « non localité fictionnelle », v. Yocaris 2006a : 405-407. La non localité de l’espace fictionnel de Triptyque découle d’une imbrication oxymorique de ses trois composantes fondamentales (les trois séquences narratives de base), que l’on peut approximativement formaliser en termes ensemblistes comme suit : S1 ⊃ S2 ; S2 ⊃ S3 ; S3 ⊃ S1. La construction narrative de Leçon de choses est autrement plus complexe, et nécessiterait une étude à part.
[31] Sans rentrer ici dans des considérations plus détaillées : v. Yocaris 2012, 2013c.
[32] Rappelons que, selon Catherine Kerbrat-Orecchioni (1986 : 116), il y a « trope implicitatif » « chaque fois qu’un contenu présupposé ou sous-entendu apparaît en contexte comme le véritable objet du message à transmettre ».
[33] Extrêmement précieuse du fait de la richesse des annotations et de la qualité des contributions qu’elle contient, cette édition doit être considérée d’un strict point de vue herméneutique comme une base de travail, et non pas comme un aboutissement.
[34] L’« altertexte » est défini par R. Gay-Crosier (1986 : 321) comme « une espèce de texte négatif » engendré par « les parties manquantes, les morceaux absents, les déchirures et les trous que créent les coupures et les découpures dans le tissu textuel ».
[35] Le « métatexte » est produit mentalement par le lecteur des romans simoniens à partir d’une confrontation du texte qu’il a sous les yeux, des intertextes et de l’altertexte : il s’agit en somme d’un « miroir totalisant qui aspire à rassembler les jeux de miroir du texte romanesque » (Gay-Crosier 1986 : 323).
[36] Cf. p. ex. van Appeldoorn 1982.
[37] V. Van Rossum-Guyon 1971, Gay-Crosier 1986, Riffaterre 1988, Orr 1993 ; cf. aussi Gignoux 2003 : 27-37.
[38] Comme le souligne R. Gay-Crosier (1986 : 326), dans un roman comme Les Géorgiques « [l]a cohérence interne se déplace du niveau de la logique de cause à effet […] au plan d’une métalogique fictionnelle dont les assises sont des métaphores filées, le rétrorécit intermittent, la déchronologie soutenue, des lexies répétées, des images obsédantes de par leur récurrence, de constants renvois à un inventaire d’événements et de discours réitérés […] qui se constitue, au fil de la lecture, en véritable encyclopédie d’intertextes truqués ou réels ». Or, à ce jour, aucun auteur n’a pu montrer dans le détail en quoi consiste cette « métalogique fictionnelle » …
[39] Cf. Herschberg-Pierrot 2005.
[40] Cf. Minich Brewer 1995 : 73-111.
[41] Pour plus de précisions sur la différence entre « intertexte » et « interdiscours », nous renvoyons ici aux travaux de Jean-Michel Adam : ce dernier se propose de réserver le premier de ces deux concepts « aux échos libres d’un (ou de plusieurs) texte(s) dans un autre texte », le deuxième relevant plutôt d’un ensemble de « pratiques discursives propres à une formation sociodiscursive, […] qui prennent la forme des divers genres du discours journalistique, des genres du discours politique, des genres littéraires, etc. » (Adam 1999 : 85).
[42] Cette étude porte du reste pour l’essentiel non point sur l’allégorie en tant que figure, mais plutôt sur le « thème de l’allégorie » (Isolery 2000 : 78) dans Histoire.
[43] Cf. la contribution de Catherine Rannoux dans le présent recueil.
[44] Ainsi par exemple l’agencement narratif mis en place dans La Route des Flandres entre directement en résonance avec des figures de style récurrentes comme l’énallage de personne ou l’oxymore, qui en offrent une représentation « miniaturisée » en condensant d’une certaine façon sa signification proprement philosophique : cf. Yocaris 1997 : 174, Yocaris 2002 : 253-257, 290 etc.
[45] Cf. n. 5.
[46] Cf. Riffaterre 1983 : 12.
[47] Pour plus de précisions sur le couple oppositionnel « dénotation vs exemplification », cf. Goodman 1968 : 3-6, 45-57, Goodman 1978 : 31-32, Yocaris 2008a : 225-228.
[48] Je signale, dans ma thèse sur « L’orphisme et la polyphonie dans les textes de Claude Simon », que cette conjoncture est tout à fait fictive et qu’elle sert justement, je dirais même uniquement, à mettre en relation ces trois « instances » représentatives de la fin du XVIIIe siècle, un général napoléonien, artilleur et franc-maçon, le compositeur et l’architecte tous deux « orphiques », connus pour leur affiliation avec les franc-maçons. Il n’est donc pas surprenant que j’accorde une telle importance à la remarque de Françoise van Rossum-Guyon au sujet du symbolisme de cet arbre qu’est l’acacia (« Un regard... », 130) : « Dans la tradition maçonnique, l’acacia, symbole de régénération spirituelle, c’est-à-dire immortalité et résurrection. Sur les monuments de l’Égypte ancienne figure un sarcophage d’où sort un acacia et la devise : Osiris s’élance, signifiant "la vie sort de la mort". »
[49] La photographie de ce bas-relief qui se trouve au Musée national de Naples est d’ailleurs reproduite sur la couverture du livre Orpheus : The Myth of the Poet, de Charles Segal.
[50] C’est d’ailleurs une pratique courante chez Simon, tant dans Les Géorgiques que dans ses autres romans avant les années quatre-vingt. Le terme « mythème » est emprunté surtout à Gilbert Durand, comme il en parle à plusieurs reprises dans Figures mythiques et visages de l’ouvre
[51] Parmi les romans simoniens de cette époque, le plus « hermétique », dans le sens de la difficulté qu’il représente pour la lecture, est probablement Triptyque (1973) que Ricardou a lui-même analysé, surtout au niveau de sa structure, dans le contexte du Dispositif osiriaque » (Nouveaux Problèmes du roman, 179 et sq.).
[52] J’indique l’exergue au complet : « Cela nous submerge. Nous l’organisons. Cela tombe en morceaux. Nous l’organisons de nouveau et tombons nous-mêmes en morceaux. » (Histoire 7)
[53] Je cite ici la fin de sa note, dans l’article déjà indiqué : « Sur les monuments de l’Égypte ancienne figure un sarcophage d’où sort un acacia et la devise : Osiris s’élance, signifiant "la vie sort de la mort". » (Chemins, 130)
[54] J’emprunte ce terme à François Rigolot, Poétique et onomastique (113).